L’agriculture biologique est une alternative à l’agriculture conventionnelle ; elle rejette l’utilisation de produits chimiques de synthèse et d’organismes génétiquement modifiés (OGM).
Les avantages que procure l’agriculture biologique :
1 – diminution des coûts de pollution : économies d’énergie et diminution des rejets ;
2 – protection de la santé publique, par rapport à l’agriculture conventionnelle dont la toxicité est avérée ;
3 – sécurité alimentaire, notamment dans les pays en développement, si l’on prend en compte les avantages de l’agriculture paysanne, par exemple en matière de liens sociaux.
MONSANTO (aujourd’hui BAYER) a racheté tous les semenciers, éradiqué les anciennes variétés qui se reproduisaient et développé un marché captif où les paysans doivent racheter chaque année l’hybride F1, stérile ou dégénérescent.
Voilà comment pesticides et OGM se sont imposés dans beaucoup de campagnes mais cet été, au moment de son rachat par BAYER, le vent a tourné pour MONSANTO condamné à verser 78,5 millions de dollars à un jardinier atteint du cancer, après avoir utilisé l’herbicide Roundup. Depuis, BAYER a perdu 30 milliards de dollars de valeur boursière.
Le label européen symbolisé par une feuille formée par des étoiles est moins sérieux que le label français AB car on admet que les produits puissent contenir des traces d’OGM. D’autres labels : Bio cohérence (en France) et Déméter (en Allemagne) sont plus rigoureux encore et ne travaillent pas avec la grande distribution.
En France, 6,5% des surfaces agricoles sont consacrées à l’agriculture biologique, un part en forte croissante du fait de la demande des consommateurs qui a augmenté de 20% en un an. La part de 1,5% des surfaces agricoles pour l’agriculture biologique dans le monde est peu représentative car elle n’intègre pas les nombreuses petites exploitations familiales cultives sans intrant de synthèse.
Peut-on nourrir en bio 9,5 milliards d’individus en 2050, 10 à 11 milliards en 2100 ?
Selon un chercheur de l’Institut National de Recherche Agricole (INRA), cette réponse est mal posée ; il vaudrait mieux se demander : est-ce que l’agriculture biologique peut répondre à l’ensemble des enjeux sociétaux d’aujourd’hui dont celui de l’alimentation ?
Globalement, on considère qu’il y a un écart de productivité de 20% au bénéfice de l’agriculture conventionnelle mais primo ce chiffre cache de fortes disparités entre Nord et Sud : Dans les pays occidentaux, cet écart peut atteindre 50% comme en France, alors qu’en Afrique ou en Asie, il est quasiment nul, l’agriculture biologique offrant même parfois une meilleure productivité.
Secundo, les prix du marché ne tiennent pas compte des externalités négatives, c’est-à-dire les activités qui affectent le bien-être, la santé, le vivre-ensemble, sans contrepartie monétaire.
L’agriculture biologique est une réponse au besoin de dés-intensifier la production agricole car elle a fait ses preuves en termes de compromis entre niveau de productivité et respect de l’environnement.
Comment faire ?
- Diminuer le gaspillage des ressources alimentaires estimé à 30% selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, en anglais, Food and Agriculture Organization of the United Nations (F.A.O.) ;
- Modifier nos régimes alimentaires, par exemple en limitant la consommation de viande.
L’INRA a cherché à appliquer les principes de l’agro-écologie, c’est-à-dire complexification et diversification, à l’élevage ; en comparant un élevage de moutons à côté d’un élevage de vaches à un élevage qui rassemble les deux espèces, c’est ce dernier qui présente les meilleurs résultats, en termes d’état sanitaire des troupeaux, de productivité et d’impact environnemental.
Le passage de l’agriculture conventionnelle à l’agriculture biologique implique de revoir le système de production, à l’image de la permaculture, l’aquaponie et l’agro-écologie.
Comment changer de système de production agricole ?
L’agriculture biologique, c’est travailler en préventif, plutôt qu’en curatif : mise en place de filets contre les insectes, décaler les dates de semis dans la saison, accepter les herbes folles qui constituent des réserves d’auxiliaires ; il pourra se créer un équilibre entre auxiliaires et ravageurs, de sorte que les effets des ravageurs se trouveront atténués.
Dans une approche globale, l’agriculture biologique présente d’importantes externalités positives comme, par exemple, la préservation de la planète et le lien social. Les AMAP, Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne, appellent leurs adhérents à devenir consom’acteurs et apportent au producteur un revenu raisonnable.
Quels sont les freins à la conversion ?
- Historiquement, il y a un frein psychosociologique : il y a le regard des autres, ce n’est pas évident de na pas suivre la norme mais ce frein diminue en puissance à force de voir l’agriculture biologique devenir de moins en moins marginale ;
- Autre frein : l’enherbement ; en agriculture biologique, pour remplacer les pesticides, soit on diversifie, soit on doit investir dans du matériel mécanique, ce que permettent les CUMA, Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole ;
- Le manque de volonté des pouvoirs publics : la certification peut prendre plusieurs années, ne serait-ce que le temps de dépolluer le sol de toute trace de pesticide ; c’est ce que devraient permettre les aides à la conversion qui n’ont pas été toutes versées. Les aides au maintien ont disparu sous la pression de la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA) d’un point de vue opposé à la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB) qui prône la prise en compte des services environnementaux comme par exemple la sauvegarde des abeilles ;
- La gestion du personnel constitue un frein : l’agriculture biologique emploie 1,6 fois plus que l’agriculture conventionnelle or il peut paraître difficile de dégager la capacité financière d’un salaire et l’embauche de personnel est souvent considérée comme risquée.
Le passage de l’agriculture conventionnelle à l’agriculture biologique est un vrai bouleversement, y-compris au niveau des principes économiques : la sacrosainte spécialisation se voit ainsi contrariée ; pour des raisons logistiques ou bioclimatiques, certaines régions se sont spécialisées ; on a dit aux bretons « vous produirez du porc », aux beaucerons « du blé », aux méridionaux « des fruits »…
Au niveau d’une ferme, quand l’agriculture conventionnelle engage trois cultures identiques sur des rotations assez courtes (c’est-à-dire la durée entre deux semis sur une même parcelle), ce sont six à huit cultures différentes en agriculture biologique :
- une place importante à la valorisation ;
- l’utilise des mauvaises herbes pour lutter contre les ravageurs ;
- l’accent mis sur la fertilisation ;
- sur la coopération entre élevage et agriculture ;
- l’introduction de cultures alternatives comme les légumineuses.
Pour contrer l’effet dévastateur de ces lobbys industriels et agricole mus par le seul appât du gain, le pouvoir politique semble inopérant, d’où l’urgence d’un lobby citoyen appelé de ses vœux par Cyril DION, le réalisateur du film « demain », dans son ouvrage « Petit manuel de résistance contemporaine » (Actes Sud), et porté par le mouvement « nous voulons des coquelicots ! »
Car pour voir s’accomplir la transition, il reste à :
- investir dans la recherche agronomique ;
- changer les habitudes de production et de consommation ;
- repenser la spécialisation de nos filières agroalimentaires.
Merci à Splash – Nouvelles Ecoutes « le passage de l’agriculture au tout bio » & Le Monde du 2 novembre 2018 « Bayer, dans l’enfer du mariage avec Monsanto »